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Ci-gît l'enfant Mtoto : la plus ancienne sépulture d'Afrique dévoile ses secrets
Ci-gît l'enfant Mtoto : la plus ancienne sépulture d'Afrique dévoile ses secrets
Datée de 78.000 ans, il s'agit de la plus ancienne sépulture connue en Afrique, où l'humain moderne est apparu. Sa mise au jour, décrite mercredi 5 mai 2021 dans la revue Nature, est le fruit d'un long processus jalonné de surprises.
Reconstitution virtuelle du squelette de Mtoto ("enfant" en swahili), enterré en position foetale il y a 78.000 ans en Afrique de l'Est
Le petit défunt reposait là depuis 78.000 ans, soigneusement enterré par les siens : au Kenya, les archéologues viennent de mettre au jour la plus ancienne sépulture d'un homme moderne en Afrique, au terme d'une folle épopée scientifique révélée mercredi 5 mai 2021. "Mtoto" ("enfant" en swahili), comme l'ont baptisé les chercheurs, est mort vers l'âge de trois ans à Panga ya Saidi, une vaste grotte nichée au cœur d'une forêt, près de la côte kényane. Son corps a été enfoui dans une fosse, enveloppé dans un linceul et couché en position fœtale, évoquant un rituel funéraire élaboré au sein de sa communauté, des Homo sapiens chasseurs-cueilleurs qui résidaient là il y a 78.000 ans.
Il s'agit de la plus ancienne sépulture connue en Afrique, où l'homme moderne est apparu. Sa mise au jour, décrite mercredi dans la revue Nature, est le fruit d'un long processus jalonné de surprises. Tout commence en 2013. Une équipe d'archéologues fouille la grotte, un gisement connu où ont déjà été trouvés maints outils préhistoriques.
"Progressivement, nous avons découvert une partie d'un petit squelette de notre espèce"
Les scientifiques identifient une cavité inhabituelle, où apparaissent des ossements, mais qui se désintègrent dès qu'ils veulent les extraire. Ça n'est qu'en 2017 qu'interviennent des fouilles supplémentaires, exposant la totalité de la fosse, une petite tombe creusée à trois mètres sous terre contenant un amas d'os décomposés. Nul ne sait s'il s'agit de restes humains ou animaux - "vu la taille de la fosse, certains pensaient à un singe", a raconté Michael Petraglia, de l'Institut Max Planck, l'un des auteurs de l'étude, lors d'une conférence de presse.
Cette fois, pas question de laisser filer les fragiles os : ils sont consolidés, plâtrés dans un bloc. Et partent en toute sécurité au Musée d'histoire naturelle à Nairobi, où les scientifiques extraient délicatement des dents semblant appartenir à un homininé. Les spécimens prennent alors le chemin, dans les mains d'un chercheur kényan, d'un laboratoire spécialisé dans la conservation, à Burgos, en Espagne. Là, une technique d'imagerie (tomographie) permet de voir à l'intérieur du bloc, sans le dégrader. "Progressivement, nous avons découvert une partie d'un petit squelette de notre espèce", se souvient avec émotion Maria Martinon-Torres, auteure principale.
"Monde symbolique"
La conclusion des chercheurs : "Cet enfant a délibérément été placé là, et a fait l'objet d'une attention délicate de la part de sa communauté", décrypte la chercheuse du Centre national sur l'évolution humaine à Burgos. Elle concède que l'interprétation est difficile. La position fléchie, assez commune dans les sépultures d'Homo sapiens ou de Néandertal, peut notamment signifier un simple souci pratique de gain de place. Mais avoir couché Mtoto "comme s'il dormait", protégé d'un linceul, suggère à ses yeux "une tendresse, un geste d'adieu donnant de la chaleur dans le plus froid des moments". Ce comportement prouve selon elle "que les anciens humains en Afrique vivaient aussi dans un monde symbolique", et étaient donc déjà dotés d'une cognition complexe, dont on cherche à comprendre quand et comment elle est née.
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